De passage au Luxembourg, l’économiste et journaliste Christian Chavagneux revient sur les réformes en matière de contrôle bancaire préconisées par le G20.

« Une crise globale nécessite une solution globale », indiquaient à Londres les pays du G20 dans leur déclaration finale d’avril dernier. Trois mois plus tard, les 24 et 25 septembre 2009, le groupe des 20 États – qui totalisent 90% du produit mondial brut – se réunissait à nouveau à Pittsburgh, aux États-Unis.

L’objectif? Entre autres réformer les régulations bancaires et financières; légiférer pour mieux encadrer les banques; empêcher leurs multiples dérives qui furent à l’origine de la crise.

Au-delà du discours, plusieurs grands axes concrets ont été développés à Pittsburgh, par la communauté internationale, sur ces sujets. Et notamment pour mieux contrôler le travail des banques.

« On s’aperçoit que les banquiers ont toujours été impliqués dans toutes les crises financières importantes », remarque Christian Chavagneux.

L’économiste et journaliste – il est rédacteur en chef adjoint d’Alternatives Economiques et rédacteur en chef de la revue L’Economie politique – était le récent invité de la fondation écologique Gréng Stëftung.

Une première piste serait de les obliger à mettre beaucoup plus d’argent de côté en périodes fastes, pour disposer d’un capital important face aux situations plus critiques.

Responsabiliser les banques

Un second axe serait d’enrayer leur politique de crédit – souvent trop inconséquente, et bien souvent aussi à l’origine de la bulle spéculative –, par une approche macro-prudentielle de contrôle du secteur, dans son ensemble cette fois, et non plus sur une base individuelle.

« Si prise individuellement, chaque institution ne court pas de grands dangers, on s’aperçoit que le risque – systémique notamment – encouru par le secteur bancaire dans son ensemble, est plus important », observe le journaliste.

Aussi, une troisième solution viserait à réduire leur dépendance vis-à-vis du financement à court terme. La crise des subprimes a été suivie d’une crise des liquidités.

« On s’est aperçu après la faillite de Lehman Brothers, en septembre 2008, que toutes les banques étaient paniquées, le marché interbancaire quasi fermé et que les banquiers ne se prêtaient plus au jour le jour », remarque M. Chavagneux, qui montre ainsi du doigt ce paradoxe des institutions financières prêtant à long terme, mais se (re)finançant à court terme.

Comment éviter qu’une telle situation ne se reproduise ? « En veillant à ce que les ressources des banques ne soient pas trop dépendantes de leur emprunt au jour le jour », préconise notamment le chercheur-associé au Centre for Global Political Economy de l’université de Sussex.

Une quatrième démarche consisterait ensuite à faire payer, en cas de crise, les banques et non pas les contribuables. « Nous sommes dans une situation que les économistes appellent l’’alea moral’ », note-t-il.

« Les banques savent qu’elles sont couvertes par l’État, en cas d’importantes prises de risques, et en cas de tourmente financière. »

Une première mesure de bon sens serait d’« éviter que les banques ne soient trop grosses, ne développent leurs activités de manière trop importante et donc soient plus difficiles à couvrir en cas de crise. »

Vae Victis?

Cinquième axe, la notion de testament bancaire commence à s’imposer :
« Ne pourrait-on pas instiller dans les têtes des banquiers qu’ils peuvent eux aussi mourir ? ».

La solution consisterait ici pour le journaliste « à demander aux banques de faire le testament de leur banque, et d’indiquer le détail exact de leurs activités pour que le cas échéant, les autorités publiques puissent réagir rapidement et isoler le bras malade de la banque pour en garder, voire sauver les activités saines. »

Toutes ces mesures pour un meilleur encadrement des activités bancaires seront-elles suivies d’effets ? « Aujourd’hui les autorités ont des vrais projets techniques qui sont bien en place, confirme M. Chavagneux. Il y a une vraie volonté politique au sein des banques centrales pour réguler en profondeur les banques. »

Selon toute probabilité, le G20 devrait les finaliser très rapidement. On peut s’attendre à ce que les institutions financières entament une longue période de purgatoire prudentiel, d’autant que pour elles, la facture risque aussi d’être élevée.

Selon une première estimation, le capital qu’elles devront mettre de côté pour être conformes sera multiplié par trois.

« Elles deviendront par ailleurs moins rentables », précise l’économiste. Une mise au pas prudentielle pour le bien commun, dont il ne peut que se féliciter.

paperJam, octobre 2009

« Les paradis fiscaux cachent la vraie image de la mondialisation »